On peut dire que j’attendais cet album avec impatience. Suite à la magnifique claque infligée par The Brothel il y a exactement deux ans, je ne demandais pas mieux que de tendre l’autre joue… et après une semaine d’écoute intensive, me voici  arrivé à cette étrange conclusion: ca fait encore plus mal la seconde fois.

The Silicone Veil nous offre une Susanne Sundfør au paroxysme de son art : mélodies venues d’ailleurs qui vous hantent pendant plusieurs heures, voix crystaline à la fois fragile est puissante et textes sublimes offrant plusieurs niveaux de lecture. Le tout servi par une production frôlant la perfection. Dès les premières minutes de « Diamonds », on se retrouve plongé au coeur d’un univers sombre et envoûtant, à l’atmosphère quasi cinématographique (« White Foxes », qui sera d’ailleurs sur la B.O du film suédois Verden Venter fin 2012, mais aussi « Can you feel the thunder » , nous faisant remonter le temps jusqu’aux 60’s d’Audrey Hepburn… et surtout le sublimissime instrumental « Meditations in an emergency ») qui fait voyager notre âme 45 minutes durant. L’alliance (que certains auraient pu a priori juger contre nature) entre les arrangements éléctroniques de Lars Horntveth (Jaga Jazzist) et le piano de Susanne semble plus harmonieuse que jamais, tandis que les solistes de l’orchestre national de Trondheim et la harpe de Sunniva Rødland Wettre (mmmm ces arpèges sur « Diamonds » et « The Silicone Veil »…) viennent apporter un peu plus de finesse à un son à ébranler les murs.

Contrairement à The Brothel, ce nouvel opus de la native de Haugesund ne comporte pour ainsi dire aucun titre plus faible que les autres. Chaque morceau possède sa propre identité et tonalité, souvent sombre, et offre la sensation de visionner un court-métrage : les images se succèdent, l’intensité dramatique va crescendo… et l’auditeur se retrouve submergé par cette combinaison délicieuse d’éléments synthétiques et organiques. Du fabuleux « Rome » et son final épique, en passant par les glacials et accrocheur « White Foxes » et « The Silicone Veil » ou les plus rythmés « (Stop) Don’t push the button » et « Among us », rien, absolument rien n’est à jeter sur cet album. Les 9 titres le composant sont autant de joyaux que tout amateur de musiques sincères, subtiles, sombres et captivantes se doit de découvrir.

Si je devais me risquer au petit jeu des comparaisons (extrêmement difficile cette fois, mais je suis d’humeur joueuse), je rapprocherais sans doute la musique de Susanne Sundfør de celle d’artistes telles que Tori Amos, Florence and the Machine voire PJ Harvey ou Björk. Saupoudrez le tout de nappes de claviers dignes de Silent Hill, de moments de poésie pure, de rythmiques éléctroniques savamment dosées et d’une voix aussi fascinante (mais plus profonde) que celle de Kate Bush et vous aurez une meilleure idée de ce à quoi vous pouvez vous attendre…

J’ai beau chercher, je ne parviens pas à trouver de réel défaut à The Silicone Veil, si ce n’est l’absence de « Memorial » (titre joué sur scène à de nombreuses reprises et curieusement absent du track listing final) et sa durée trop courte (44 minutes 30, soit moins qu’un titre de Transatlantic… mais il est vrai  équivalent à 44 chansons des Misfits), et me vois contraint de conclure en attribuant une nouvelle fois la note maximale (après Weather Systems d’Anathema il y a quelques semaines…). N’y voyez surtout pas un excès de d’enthousiasme ou de subjectivité (moi aussi j’aime bien critiquer et jouer au prof vachard qui se la pète…), mais plutôt une confirmation que l’année 2012 est d’ores et déjà un putain de millésime!

Un album magnifique et unique, combinant à la perfection passé, présent et futur. Alors même si c’est la crise, que la fin du monde est pour bientôt ou que vous devez faire des travaux dans votre salle à manger… mettez quelques euros de côté et ne le manquez surtout pas. Le bonheur auditif n’a pas de prix!

10/10

Disponible le 26 mars 2012. Pour l’acheter : http://shop.groenland-records.com/ et http://shop.susannesundfor.com