La musique de Falls of Rauros est semblable à une montagne: souvent menacante, elle sait aussi apaiser et enivrer avec une force telle que l’envie d’y regoûter se fait inévitablement sentir sitôt l’expérience terminée. Et lorsqu’elle nous guide hors des forêts de résineux et loin des sommets enneigés des Appalaches, c’est pour mieux nous transporter vers les dunes balayées par le vent de la côte atlantique.
En effet, bien que pouvant paraitre presque pompeux à première vue, le parallèle entre la Nature et la musique de ce groupe originaire du Maine (plus précisément du “petit” Portland, celui de la côte est des Etats-Unis) est tellement évident et incontournable dès les premiers accords qu’il serait indécent d’évoquer Falls of Rauros d’un point de vue purement stylistique et critique, en faisant abstraction de toute dimension poétique. Et si tout comme moi vous avez un penchant pour les métaphores, alors imaginez une peinture de Theodor Kittelsen. Voilà, vous y êtes presque…
J’ai découvert ce groupe il y a un peu plus de deux ans, par hasard et par le biais de leur fantastique second album The Light That Dwells In Rotten Wood (2011). Un album qui, notamment de par ses thèmes rappelant immanquablement les écrits de Henry David Thoreau, avait alors eu un réel impact sur moi. Depuis lors, j’ai compté les semaines jusqu’à l’annonce de son successeur, tant ce disque est rapidement devenu un des mes préférés de ces dix dernières années. Autant vous dire que j’attendais beaucoup de ce Believe In No Coming Shore et de ses six titres (même si l’excellent split avec Panopticon était venu récompenser ma patience entre temps).
Force est de constater que le savoureux mélange de sonorités black et folk qui avait fait des merveilles sur le précédent opus est toujours là, mais il est cette fois enrichi par une multitude d’autres influences (country, rock 70’s, post-rock…) parfaitement intégrées et permettant à la musique de Falls of Rauros de s’éloigner encore un peu plus de celle de groupes tels qu’Agalloch ou October Falls. Des sonorités de guitares belles à en pleurer de « Blue Misshapen Dusk » aux soli habités de « Spectral eyes», en passant par le tellurique « Ancestors of smoke » et les fabuleuses harmonies de « Waxen voices », tout flirte ainsi avec la perfection. Qu’il s’agisse de la production délicieusement vintage (mais pas trop), des vocaux déchirés ou des parties de batterie galopantes et nerveuses, chaque élément contribue à faire de Believe In No Coming Shore un joyau incontournable pour tout amoureux de musique, « extrême » ou non.
De même, l’équilibre entre les différentes parties et la qualité d’écriture sont tels qu’il est quasiment impossible d’extraire un titre en particulier. Si l’enchainement « Ancestors of Shadow » / « Ancestors of smoke » fait forte impression dès la première écoute, l’album révèle peu à peu ses secrets et dévoile une multitude de magnifiques parties et mélodies au fil des écoutes. D’où l’absence de lassitude après bon nombre d’écoutes.
A l’heure où tant de groupes se contentent d’appliquer à la lettre les recettes de leur prédécesseurs et où la quête du son voire de l’esprit des seventies relègue au second plan la créativité et l’inspiration, il est véritablement précieux et rassurant de constater que d’autres, tels que Falls of Rauros, parviennent à tracer un chemin sans se soucier des étiquettes et des modes. Un chemin qui les mènera sans doute au sommet de la montagne… (Sortie le 1er octobre 2014)
9/10
Un grand merci à Marty/Bindrune recordings.
Pour précommander :
Site officiel : fallsofrauros.blogspot.no